Assise sur le pas de la porte…

… j’écoute les rumeurs du village. Un rideau de fer qu’on abaisse, les vaporetti (oui, comme à Venise) qui traversent en crachotant vers Galatas (le village d’en face, à 200m tout au plus), les pétards que les enfants font éclater — les garçons, en fait. Les petites filles, comme les femmes d’un certain âge, ne sont nulle part dans l’espace public, ou à peine visibles.

Jeudi, une bande de gamins a improvisé un match de foot dans la venelle où nous habitons — une toute petite rue qui monte des quais et se termine par une volée de marches blanchies à la chaux. La vieille dame qui habite en face, exaspérée par leurs cris, les a chassés avec son tuyau d’arrosage. Depuis, les chenapans s’amusent à faire éclater des pétards de plus en plus puissants sous ses fenêtres. Hier samedi, ils en étaient presque à la bombe H. J’ai fini par m’adresser à l’un d’eux, un beau garçon de 13 ans aux yeux de velours qui parlait un anglais plein de roulades appris dans la rue. Je lui ai demandé s’il a une grand-mère. «Nèh», il a dit. (Ça veut dite oui, et pour non, on dit «okhi», c’est assez confondant.) «Tu l’aimes bien, ta yaya?» — Nèh! — Tu imagines si des garçons comme toi venaient l’embêter avec des pétards?

Son regard a changé. «I will tranneslate», a-t-il dit en désignant ses copains du menton. Il leur a expliqué ce que je venais de dire, et eux qui rigolaient en douce se sont tus soudain. J’ai ajouté que je les trouvais tous très drôles et très mignons, que les pétards me faisaient rire, mais que la vieille dame là-haut avait peut-être besoin de se reposer. Ils sont partis en s’égaillant comme une volée de moineaux et sont allés faire éclater leurs pétards ailleurs.

Comme nous n’avons pas de balcon ni de terrasse et que notre joli studio en rez-de-chaussée est un peu sombre, nous avons pris l’habitude de sortir une petite table et deux chaises carrément dans la ruelle. Quelquefois des gens passent et nous saluent sans autrement s’étonner de nous voir là.

Ce matin, pendant que nous prenions notre petit-déjeuner, un vieux monsieur s’est arrêté pour nous souhaiter joyeuses Pâques, nous serrer la main et nous tapoter l’épaule, tout gentil et chaleureux, comme attendri de nous voir.

Là, nous squattons la terrasse d’un restaurant fermé pour Pâques, mais dont nous profitons de la connexion internet. Une bouteille de rosé à 2,50€, un sac de chips à l’origan, quelques olives, la vue sur la rade et la promenade où déambulent les familles sous le soleil déclinant…

Mon idée du bonheur.

 

 

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