C’était dans la région de Gothèye. Il faisait une chaleur de forge, un souffle brûlant qui vous cuit la peau, vous fait bouillir le sang et fondre le cerveau. Mais la vie était partout, j’étais dans un album de Tintin, un film, un rêve, avec pas assez d’yeux pour tout embrasser. Les Touaregs à la peau tannée coiffés de leur inamovible chèche (ou turban) y viennent vendre ou acheter des dromadaires; les Peulhs des boeufs, des chèvres ou des moutons.
On empile les bêtes sans ménagement dans des camions, sur le toit des minibus, dans des charrettes. Les dromadaires résistent, blatèrent, se cabrent; les chèvres attachées par les quatre pattes bêlent désespérément. Les hommes marchandent et boivent du thé, un thé amer qu’ils gardent chaud sur de minuscules braseros en fil de fer. Les femmes, à l’écart sous des tentes de fortune, font la cuisine, la sieste, la conversation.
J’ai fait rigoler un jeune Peuhl, près de l’enclos des dromadaires à l’air dédaigneux, quand je me suis mise à les appeler en tendant la main comme on appelle les poules: «Petits, petits, petits!»
Des fois, je suis drôle.
Après, nous avons erré dans le marché «ordinaire» (je n’ai jamais vu de marché «ordinaire»), acheté des morceaux de noix de coco, de petits beignets de farine de niébé, des mangues, des arachides. C’était bon!