L’automne est bien installé. Mon frêne a laissé s’envoler toutes ses feuilles d’or sous un vent anormalement chaud. Le tilleul commence à blondir, et le saule pleureur, valeureux guerrier, gardera sa chevelure verte jusqu’au dernier moment. Le mois de novembre, affreux, brun, triste et mouillé, prépare son entrée. D’habitude, mon âme prend les mêmes teintes, que rien ne peut diluer, pas même (ou surtout pas) quelques verres de vin.
Mais le Pérou m’attend. J’y serai pour huit mois, peut-êre plus, à compter de janvier — à moins que je ne décide de partir dès la mi-décembre pour y passer Noël. Ça doit être chouette, Noël au Pérou. Et ce sera sans doute plus gai que si je passais les Fêtes ici, moi la cheffe de tous les Grincheux.
Ça fait que je serai basée à Caraz, une petite ville de 22.000 habitants perchée dans la Cordillera Blanca, à 2500 m d’altitude. Allez googler ça, vous verrez les paysages…
C’est une région habitée par une importante communauté quechua, où les gens vivent principalement de l’agriculture. Je travaillerai comme conseillère en communication avec Allpa, un organisme qui soutient l’amélioration de leurs méthodes de production et de commercialisation.

Photo tirée de Hostelroomsearch.net
En attendant, je pars mercredi en train pour Halifax à l’invitation de VIA Rail. Comme La Presse ne veut plus accepter d’invitations mais affirme du même souffle n’avoir plus de budget pour payer les voyages, le papier que j’en tirerai (et qui sera publié ailleurs) ne paiera même pas le tiers de ce que me coûteront mes trois jours à Halifax. Mais je m’en fiche. J’aime tellement les voyages en train… Et puis je rêve de Halifax depuis que j’ai vu L’Histoire d’Adèle H., ce presque vieux (1975) film de Truffeault dans lequel Adjani, dans la peau de la seconde fille de Victor Hugo, poursuit un amant illusoire qui s’est fait muter là-bas justement pour la fuir.
J’espère ne pas y perdre la raison comme cette pauvre Adèle. Comme elle, j’errerai sur les quais, larmoyante et morveuse — mais ce sera en raison d’une rhinite aussi chronique que persistante. J’espère aussi qu’il fera un peu beau, sinon je serai condamnée à écluser des pintes de bière à la légendaire brasserie Alexander Keith en chantant Alouette, gentille alouette avec d’improbables compagnons.
Que le dieu du beau temps soit avec moi.